Deux âmes froides, une seule table [PV : Az]

Il faisait froid. Très froid. Malgré mon épaisse fourrure, des pieds à la tête, j'avais froid. Froid et faim, et soif ! J'étais incapable de parler, de penser, à peine de marcher. Zélir me paraissait loin. Je ne me sentais plus. Ni moi, ni mes souvenirs, ni mon traumatisme. Une heure que je pensais marcher, et, toujours, Hytnic se faisait de plus en plus loin ! Je tremble de tout mon corps, mouillée jusqu'aux os, la ville était lointaine, ma vie était lointaine. J'allais rejoindre mon Roi. Enfin, après tant d'années. Tant d'arbres m'entourent, blancs, mais on ne parle pas de Loukaïr comme le "Plaine d'Hytnic" ? Et pourtant, des arbres, à perte de vue. Une cicatrice, une fille, des yeux perçants, mon épée aussi, la mort, ma mort, ma fille ?

Je me réveillai en boule, dans un coin de la taverne. J'avais chaud, j'étais bien, mais trempée de sueur. Je m'installai correctement sur mon banc en me massant les tempes. Je laissai ma vision se réhabituer à la lumière et mes oreilles au brouhaha ambiant. Je me défis de ma fourrure en repensant à mon arrivée ici, 2 heures seulement plus tôt. Je suis restée étonnamment inconnue, personne ne s'était intéressé à moi, personne ne m'avait interpelé, pas même le tavernier pour me demander ce que je prenais. Soudain, une pelleté de diverses personnes étaient entrés dans la taverne. Et pendant une heure, ils affluaient, constamment. Là la taverne était pleine à craquée.

Puis une énième personne entra, slalomant entre les habitués et leur vomi tout en évitant les pintes de bière qui volaient en tous sens. Il n'y avait plus qu'une place : celle devant moi. A ma plus grande gène, il s'y installa, négligemment. Je sentis le rouge me monter aux joues, c'était la première fois que j'étais en contact avec une personne tout à fait inconnue. Je crois qu'il le remarqua, il me regarda, ce qui me fit baisser les yeux sur la table. Je crois qu'il s'amusait de cette situation, à vrai dire, je trouvais cela comique aussi. Je ne me pensais pas si timide, mais le contact avec le monde extérieur m'avait toujours effrayé, et j'espérais, très naïvement, qu'il ne me dirait pas un mot de toute la soirée.

Az s’avançait seul dans Hytric d’un pas souple, Calundréa volait dans les environs à la recherche d’un dragon.
Des marchants avait vu passer un dragon avec sur son dos une jeune femme, d’après l’un d’eux elle portait des habits de la cour de CastelCerf, filant à toute allure d’est en ouest.
Une nouvelle intéressante donc.
Az tenait cependant à rester discret et avait laissé son arc et sa lance dans sa selle, sa cape noire se fondait dans la nuit.
Des flocons commençaient à tomber doucement alors que les clameurs des tavernes se faisaient de plus en plus fortes, le vent commençait à se lever.
Az semblaient septique, il y avait des dizaines de tavernes et il risquait de manquer celle qu’il cherchait.
Il s’arrêta au milieu d’un carrefour, enleva un de ses gant et tendit sa main devant lui.
De petits éclairs bleus la parcoururent.
Il pouvait sentir le champ électrique de chaque personnes et se doutant que l’esprit de celle qu’il recherchait devait être tourmenté il pourrait faire un tri.
Az fit cependant une moue sceptique quand il trouva une cinquantaine de signaux correspondant, ça n’allait pas forcément être beaucoup plus simple.
Une tempête se levait, il prévint Calundréa qu’il passerait la nuit en ville qu’elle ne l’attende pas pour trouver un endroit où dormir.
Elle lui répondit brièvement et s’éloigna en douceur dans la nuit, évitant la tempête qui approchait.
Notre Dragon d’or se dirigea vers la caserne de la ville où il rentra sans difficulté.
Il compara ses résultats avec une carte détaillé d’Hytric, un capitaine de faction ce soir là l’aidant dans ses recherches.
Il put rapidement en conclure qu’une vingtaine venait de diverse maison d’habitation, où le capitaine envoya immédiatement des soldats, une trentaine des cellules ‘’d’interrogatoire ‘’ de la ville et seulement trois de différentes tavernes.
D’un geste de remerciement Az leva une main et claqua des doigts, la main se couvrit un instant d’éclairs mais il sembla accuser le coup, il prit appuis quelques instant contre un mur avant d’ajouter d’une voix essoufflé et entre coupé de blanc.
-Capitaine, vos prisonniers.
Il se reprit
-Vos prisonniers se montreront beaucoup plus loquace ce soir, profitez s’en.
Et il reparti dans un claquement de cape pour aller voir dans ces trois tavernes.
Dans la première c’était une jeune femme enlevé par des brigands, il libéra la jeune femme et laissa ses ravisseurs, paralysé, à des soldats en faction dans la rue.
Dans la seconde il se retrouva face à un apprenti sorcier qui luttait contre un esprit qui tentait de le contrôler, il coupa cette connexion d’un éclair, prit le matériel du jeune sorcier avant de confier ce derniers à une patrouille de soldats avec l’ordre express de l’envoyer à un centre de formation de magicien et en leur laissant un message pour le sorcier lui disant de retrouver Az pour récupérer ses affaires.
Puis il arriva enfin à la troisième, il remarqua instantanément une jeune femme recroquevillé dans un coin, elle portait des habits luxueux et semblait être seule.

L’un des avantages du pouvoir d’Az est qu’il pouvait directement influencer le système nerveux des gens, ainsi s’il était arrivé à poil en chantant une chanson paillarde naine personne ne s’en serai rappelé trente seconde après s’il l’avait voulu.
Ainsi aucune personne présente ne semblait remarquer sa présence ou celle de la jeune femme.

Il s’avança d’un pas souple évitant les gens ou tout ce qui aurait pu le toucher et en quelques instant il se retrouva assis devant la jeune femme qui sembla soudain gênée et qui rougit comme une adolescente.
Cela confirma les soupçons d’Az, elle avait bien été élevée dans un cadre royale à l’écart des autres et surtout des garçons, cela fit sourire Az.
Ce dernier leva une main et en un instant le tavernier les apporta deux chopes d’un bon hydromel qu’Az paya prestement avec une poignée de pièce d’argent.
Il planta son regard inquisiteur dans celui de la jeune femme en attendant qu’elle parle, d’après lui ce n’était qu’une question d’instant.
Avec un mouvement discret du doigt il créa une cage de faraday autour d’eux, les coupa du bruit de la taverne et coupant ses occupants de leur discussion à venir.
A présent il attendait.

Je toussotais en me redressant sur mon banc. Je lui souris et me penchai légèrement sur la table pour poser mes deux coudes et croiser mes doigts. En arborant ce sourire narquois, je le fixai, sereinement. Je ne cherchais nullement à l'intimidé, ou quoi que ce soit d'autre. Je voulais seulement le regarder, le dévisager, car la situation m'amusait, et j'avais remarqué son tour de Magie. Isolés de la taverne et son ambiance plus que bruyante, nous étions tout les deux, à nous sourire, à nous fixer. L'homme était là, immobile, presque vautré sur sa chaise, tout en gardant une certaine dignité, une certaine fierté, chose appréciable. Il semblait attendre que je prenne la parole, mais je ne savais pas ce qu'il me voulait, et je ne désirais pas le renseigner, pas de suite tout du moins.

Faisant allusion au sortilège, je montrai du doigt la zone autour de nous.
Pratique ce sort… Vous m'apprenez ?

Volontairement, je faisais la gamine, et ne le cachais pas. Je ne sais pas pourquoi, mais je voulais me jouer de lui, autant qu'il se jouait de moi. D'un air de défie, avec un soupçon de malice dans l'œil, je plongeai mon regard dans le siens en penchant la tête. Les leçons de séductions de Sanatharia me revinrent à l'esprit et je fis un grand sourire, espérant le gêné et le rendre mal à l'aise quand je le draguerais. Ma timidité avait absolument disparue, faisant place à un désir profond de communiquer, de le taquiner, d'appliquer les milliards de théories que m'avait fait parvenir ma tutrice sur la vie en communauté.

Az l’étudia un instant avant de s’avancer sur sa chaise, il rapprocha son visage de celui de la fille, son regard ne silla pas, elle avait de toute évidence reçu un bon entrainement.
Elle semblait vouloir jouer à un jeu dont elle ne supporterai pas les conséquences, cette pensée le fit sourire.
Il noya le regard de la jeune fille dans le sien comme il avait si souvent eu l’occasion de le faire, trouvant les moindres faiblesses de son âme.
Il fit monter doucement la tension et avança sa main droite au dessus de la table, touchant cette dernière de l’index.
-Je vous l’apprendrai quand vous arriverai à faire ça, dit-t-il dans un souffle en reculant sa main, un anneau d’électricité bleuté tournait doucement sur lui-même au centre de la table.
-Maintenant mademoiselle racontez moi ce qui vous ai arrivé ces derniers temps, et ne mentez pas l’anneau n’apprécierai pas ; ajoutât-il avec un sourire d’ange sans la lâcher des yeux.

Nos fronts se touchaient. Sans bouger la tête, je dévoilai mes lèvres en baissant mes mains pour les coucher sur la table. du coin de l'oeil j'aperçus le cercle électrique, je ne le fixai pas pour autant afin de continuer à scinder l'homme du regard.

Vous débarquez d'on ne sait où dans cette taverne et vous vous installez à ma table. De suite vous m'observez, me dévisagez et maintenant vous m'interrogez ?

Le tavernier vint nous servir. Mon interlocuteur cacha son sort en le remerciant. Quant à moi, je ne lâchais pas ses yeux. Quand il partit, je repris :

Alors que vous m'êtes totalement inconnu. Je vous répondrais peut-être si vous me dites qui vous êtes et ce que vous me voulez...

Soudain, ma main droite me brûla légèrement. Je la serrais avec l'autre mais la douleur ne s'en vint point, au contraire, elle s'intensifiait et la zone de douleur se déplaçait. Cela ne m'était jamais arrivé, je ne savais pas ce que c'était, mais j'avais l'impression qu'on me m'était en garde contre quelque chose, contre quelqu'un ; j'étais prête à sortir ma dague de ma manche droite.